Après la rue Spintay, le Printemps, la galerie Voos, la destruction de bâtiments appartenant à la société City Mall se poursuit, rue du Marteau, à Verviers. A l’abandon depuis des années, ils représentent un risque pour la sécurité des Verviétois. La Ville n’a pas d’autre choix que de les démolir. Une situation loin de plaire à l’asbl Communauté Historia qui regrette la disparition d’un patrimoine que les autorités communales auraient, selon elle, dû sauver.
Audrey Degrange
C’est un spectacle saisissant qu’offre actuellement le centre-ville de Verviers. Celui d’un balai de pelleteuses grignotant chaque jour un peu plus un bâti qui fit l’âge d’or de la cité lainière jusqu’à ce qu’un projet commercial en stop net la continuité et jette dans l’oubli les spécificités architecturales des lieux, ce que regrette amèrement ce Verviétois d’origine et directeur d’une asbl oeuvrant pour la protection du patrimoine. « Quand on voit les galeries Voos, c’est un choix qui a été justifié parce qu’on parlait de béton qui n’était pas fait pour durer malgré qu’il était plus qualitatif à l’époque, révèle Virgil Declercq, Directeur de la Communauté historia. Mais aujourd’hui, ce genre de bâtiments qui datent du 18ème, parfois du 17ème, 16ème siècle, avaient toute leur chance de pouvoir fournir un critère durable et la Ville de Verviers s’empêche d’avoir une justice de l’urbanisme, une justice spatiale dans son environnement. »
Par manque de connaissance, les villes feraient donc un peu trop facilement table rase de leurs bâtiments. Dans le cas des maisons de la rue du Marteau, la mérule décelée ne justifiait pas, selon cette asbl, une destruction totale. « La mérule, elle n’est pas née, il y a dix ans. Elle est là depuis la création de l’humanité, elle se développe avec l’humidité dans les bâtiments. Quand on voit ce genre de bâtiments qui sont parfois plus anciens qu’une façade du 19ème, la mérule était déjà là avant, elle a été traitée, les pièces ont été remplacées, un parquet ça se change, une partie de toiture aussi. Quand on a des bâtiments aussi qualitatifs, il faut pouvoir en prendre soin. »
S’il peut comprendre le raisonnement, le bourgmestre faisant fonction de Verviers justifie son arrêté de démolition pour des questions de sécurité. « C’est vraiment une mesure en dernier recours que je ne voulais pas prendre et que j’ai post-posée pendant des mois, souligne Alexandre Loffet. J’ai à peu près 4 rapports d’ingénieurs qui établissent des problèmes de stabilité essentiellement dûs à la mérule. Mais c’est vrai que le dernier rapport fin juin, pointait l’étonnement de l’ingénieur sur le fait que les démolitions n’étaient pas encore ordonnées et surtout le risque d’extension de cette mérule vers les autres bâtiments occupés et adjacents. Et puis, le risque d’effondrement est là. Et faire fi de la sécurité, je peux comprendre que quand on n’a aucune responsabilité, on peut le faire et faire des grandes déclarations. Quand on risque d’aller en prison parce qu’on n’a pas pris des mesures comme ce qui aurait été mon cas, la situation est un peu différente. »
Et de rappeler que dans les plans de City Mall, ces bâtiments étaient voués à disparaître. « Le problème est que ce sont des façades en briques avec un enduit en ciment devant et donc, elles ne savent pas être reproduites ou étançonnées. Et même quand on voit les visuels du projet qui étaient l’objet du permis, les façades n’étaient pas conservées. Ces bâtiments étaient destinés à être démolis et l’ancien permis prévoyait une reconstruction de bâtiments qui rappelaient les anciennes façades.»
S’il ne peut que constater la situation, Virgil Declercq, espère toutefois que la Ville de Verviers sera attentive à la reconstruction et qu’elle insistera auprès des promoteurs et architectes sur l’utilisation de matériaux réellement durables pour éviter, dit-il, un autre chaos urbain.