Depuis l’installation de manière permanente d’une première meute dans les Hautes-Fagnes et puis, d’une seconde dernièrement près de la frontière allemande, les attaques de loups sur le bétail n’ont pas augmenté en 2023, contrairement à ce que l’on pourrait croire « plus de loups » ne rime pas avec « plus d’attaques », comme nous le confirme Violaine Fichefet - Attachée scientifique SPW/DEMNA - Réseau Loup
"On en recense 6 dont certaines ne sont peut-être pas affectées aux loups. L’ADN ne l’a pas prouvé mais on lui laisse le bénéfice du doute, donc au maximum 6 attaques. Alors, je ne dis pas que ces statistiques sont clôturées. Il va peut-être y avoir encore des attaques mais il faut savoir que ces loups se sentent bien ici. Ils consomment énormément de proies sauvages et visiblement ils n’ont pas besoin des proies domestiques et puis pas mal d’éleveurs ont mis en place des protections.
Pour l’ensemble de la Wallonie, on dénombre cette année 12 attaques imputées aux loups contre près du double attribuées aux chiens. Des chiens qui s’en prennent aux troupeaux ce n’est certes pas nouveau. Ce qui l’est en revanche c’est qu’on dispose aujourd’hui de données là où auparavant ces attaques passaient tout simplement sous les radars et le fait que les éleveurs soient indemnisés quand ils subissent des pertes suite à une attaque supposée de loup n’y est peut-être pas étranger …
"Le plan Loup permet d’indemniser l’éleveur si on a un doute - poursuit Violaine Fichefet. - Si, c’est ce que l’on appelle « Loup non exclu », alors on indemnise. Oui, maintenant au moindre doute le Réseau Loup est appelé. « Depuis janvier 2023, on a deux fois plus d’attaques de chiens que de loups. On a enregistré plus de 20 attaques de chiens en Wallonie. Mais c’est sous-estimé puisque bien souvent on ne nous appelle pas parce qu’on sait que c’est un chien. Voilà, c’est assez effrayant et beaucoup de chiens attaquent le bétail ».
Aujourd’hui dans les deux zones de présence permanente du loup, on compte une petite vingtaine d’individus, des individus qui sont suivis de très près. Pour observer l’évolution de la population, le Réseau Loup rassemble des indices de présence comme des images mais aussi des crottes ou encore des empreintes, des indices précieux qui en disent long.
"Dès qu’on a une trace concrète càd une crotte ou une proie - nous explique Pascal Ghiette - attaché scientifique SPW/DEMNA - Réseau Loup - il y des analyses d’ADN qui sont effectuées donc non seulement on peut avoir confirmation qu’il s’agit d’un loup mais si l’ADN est de bonne qualité on peut savoir de quel loup il s’agit et arriver à l’individu. Et grâce à cela, on peut avoir une idée très précise du nombre d’individus qui sont installés, mais bien sûr pas des dispersants qui ne font que traverser le territoire wallon ».
Si chez nous, on a une idée assez précise du nombre d’individus ce n’est pas le cas partout. L’Europe face à la prolifération de l’espèce sur son territoire tire la sonnette d’alarme. Elle voudrait revoir le statut de protection du loup et propose de l’enlever de la liste des espèces dites vulnérables ce qui ouvre le champ à l’abattage. Pour le Réseau Loup cette proposition d’abattage comme il a déjà cours en France n’est pas une solution d’autant que chez nous l’abattage par dérogation des loups dits "à problèmes" existe déjà .
« En France, ils ont établi des quotas càd un pourcentage de la population totale présente sur le territoire français, précise encore Pascal Ghiette - donc ils vont éliminer des loups et parfois des loups qui ne posent aucun souci. Et au contraire des loups qui sont spécialisés sur les attaques du bétail domestique pourraient passer entre les mailles du filet. Donc un tir comme cela à tort et à travers ça n’a aucun sens. De plus, si comme le règlement wallon le permet on peut éliminer les loups qui posent vraiment des problèmes on a pas besoin de changer le statut du loup au niveau européen! ».
Le loup depuis son retour naturel polarise l’attention, crispe mais aussi divise. L’Europe crie au loup. Elle ravive les peurs et radicalise les opinions. La question du loup entre aujourd’hui pleinement dans le champs politique et ce n’est certes pas pour apaiser les débats! (Abi)