Le paysage des fagnes est depuis longtemps façonné par les activités humaines. Cependant notre perception de la nature a changé. La prise de conscience de l’importance de la biodiversité et de sa sauvegarde influe aujourd’hui sur les modes de gestion et les dynamiques de restauration mis en place, un changement de cap pas toujours visible sur le terrain.
Derrière le signal de Botrange sur le secteur de Thomas Wislet, agent au Département de la Nature et des Forêts attaché au cantonnement de Malmedy, nous découvrons ce qui reste d’une pessière. Cette mise à blanc aux allures de massacre serait nous dit-on un mal pour un bien; un petit séisme écologique certes mais pour la bonne cause. Thomas Wislet nous explique :
"Avant on avait une forêt pure d’épicéas. On a coupé complètement. On va nettoyer la surface du sol. Enlever tout ce qui est "épicéa" afin de permettre à la nouvelle génération de plantes et de feuillus de se développer comme cela aurait dû se faire avant que l’épicéa ne soit planté."
La pessière a donc été entièrement coupée. Une fois les grumes évacués, c’est au tour de Bruno Philippe, ouvrier forestier et sa machine d’entrer en action.
"On travaille à la demande du DNF. Parfois, on nous demande de tout enlever, ça dépend ce qui va revenir dessus. Il y a des plantations qui ne sont pas du tout intéressantes pour eux et qu’ils ne veulent pas garder ou alors au contraire comme là, on nous demande de garder des quilles mortes pour les oiseaux ou les insectes qui sont intéressés par ça ou encore de garder les feuillus existants pour éventuellement réensemencer la zone qui a été broyée… Alors l’idéal, c’est de ne pas descendre trop en terre pour ne pas dénaturer le terrain et abîmer le sous-sol…"
"Ici, on est sur un sol très pauvre, poursuit Thomas. Il n’y a pas ici de tourbières comme on l’entend mais on est sur un sol tourbeux voire para-tourbeux et donc le fait de broyer tout ce qui reste ici on va vraiment nourrir ce sol. Cette matière organique va être ainsi dispersée. Réduite en copeaux, elle va pouvoir se décomposer plus vite et apporter au sol de la matière organique et ce, sur toute la surface."
Plus tard, des clôtures seront posées le temps que les arbres qui reviennent de manière naturelle grandissent suffisamment et ne soient plus victimes des cervidés. Mais d’autres arbres seront également plantés afin de donner un petit coup de pouce à la nature! Ceci dit, pour ce qui est de la Réserve naturelle pas question de revoir de la sylviculture intensive comme par le passé, l’heure est à la régénération naturelle et à la forêt mélangée en plantant en station des arbres d’essences indigènes de préférence. La forêt de demain se sème aujourd’hui et c’est un fameux défi! (Abi)